Méthodo antique, Mr Chankowski, Séance 9, 10 & 11

Sources écrites :
Historiographie
Littéraires
Documentaires
documents : textes officiels émanant des instances publiques. Documents transmis sous forme d'inscription. Différence entre les sources littéraires et historiographiques ?
Manuscrits médiévaux conservés dans les bibliothèques. Manuscrit du quinzième siècle. Plusieurs siècles de transmission des textes appelée transmission directe, transmission manuscrite. Entre nous et l'original, il y a tout un espace, tout un temps. Lorsqu'on parle d'inscription, on parle d'une forme matérielle, et non pas d'un contenu. Inscription = appellation pour tout texte inscrit sur support dur. Aujourd'hui, inscriptions existent encore surtout pour l'épigraphie funéraire. Mais textes tout à fait privés, qui ne peuvent être qualifiés de documents.
Problème du rapport entre le texte gravé et le texte déposé dans les archives. À proprement parlé, l'original est le texte déposé dans les archives. Archives athéniennes dans l'agora. Les archives ont été confiées à une déesse particulière, d'où le nom de metroôn pour ce sanctuaire, littéralement le « sanctuaire de la mère de Dieu ». C'est l'ancien bouleutérion. Ce qu'on connaît sont des copies, très proches de l'original. Copie toute proche de l'original, pas de siècles de transmission. Est-ce que les athéniens gravaient tous les documents ? Non. Déjà une sélection. Qu'est-ce qui est gravé ? Les informations de la vie publique pour les citoyens. Moins d'inscriptions pour les cités oligarchiques. Gravure des textes devant être lus par tout le monde. Concernant les affaires qui doivent durer. Affaires internationales (entre cités) par exemple.
Ce qui est conservé est la liste de l'offrande versée à Athéna (un soixantième du phoros). La religion. Cité règle les affaires religieuses comme si elle réglait affaires publiques, juridiques... c'est la communauté qui décide. Texte : lois sacrées.
Autre type de texte : décret honorifique, surtout durant la période hellénistique, on accorde des honneurs à un individu, ces textes sont gravés. Rédigé à l'effigie d'un citoyen athénien ou d'un étranger méritant.
Comment les inscriptions sont-elles parvenues à nous ?
Ne jamais oublier qu'on les classe parmi les sources écrites, mais ce sont aussi des sources archéologiques, des objets. À ce titre, les inscriptions partagent le titre des objets antiques. L'objet lui-même peut aider à éclairer le texte. Décret de Cleinas décoré, avec des jarres. Car le tribut était transporté dans des jarres.
Dans chaque cité, magistrat éponyme.
Liste d'archontes, qui est connue grâce à un ouvrage historiographique. Liste exposée dans l'agora, on en a des morceaux. Clisthène a exercé le poste d'archonte sous le régime tyrannique à Athènes. Cela grâce à la liste d'archontes.
Les textes littéraires, on a commencé à s'y intéresser durant la Renaissance. Époque où l'intérêt est particulièrement visible est celle du classicisme. À cette époque que naît l'histoire de l'art. Phase de grandes fouilles. Grands programmes de recherches archéologiques, grands sites sont dégagés. École française d'Athènes. Restes architecturaux, beaux objets, mais aussi des inscriptions. Elles commencent à être éditées et classées dans des ouvrages. Corpus = publication contenant des inscriptions.


Sources écrites épigraphiques, savoir ce que ces sources nous apportent au sujet des régimes politiques grecs ? Enrichissement de notre base de commentaire. Dans le cas de Thucydide, on ne peut compter sur de nouvelles infos, mais on peut proposer de nouvelles interprétations seulement. Possible pour les inscriptions d'avoir des nouvelles infos, à l'aide de fouilles ou de prospections. Les inscriptions apportent sans cesse de nouvelles infos, au sujet de la vie quotidienne, des mentalités, mais surtout au sujet des institutions et des régimes politiques.
Fascicule page 73. « il a plu au conseil et au peuple » : témoignage direct sur les organisations, les institutions concrètes attestées par cette inscription. Président des prytanes, là car il est responsable de la mise en voie d'une décision. Ensuite, le proposant. Le formulaire montre tous les processus législatifs, comment les décisions étaient prises. Déjà, cette petite phrase apporte un témoignage important sur le fonctionnement des institutions démocratiques. Institutions en action. Description d'Aristote valable pour son époque. Or, avec inscriptions, on peut observer une évolution dans le temps. Avec les inscriptions, on peut en quelque sorte se promener dans le monde grec. Aussi voir la diffusion de la cité comme sorte de vie communautaire.
« L'épigraphie lutte contre la sécheresse des discussions sans fin sur des textes malaxés depuis quatre siècles, et tranche de vieilles controverses, elle est l'eau de jouvence de notre étude. » Louis Robert.

Quel est le rapport entre l'historiographie et la rhétorique ?

En analysant le discours de Périclès, problème du rapport entre le texte réellement prononcé par Périclès et le texte retranscrit par Thucydide. Dans le premier cas, accès direct à la stratégie péricléenne. Dans le deuxième cas, par l'intermédiaire de Thucydide. Il est un homme politique, un intellectuel venant d'une riche famille. Sûr qu'il était à Athènes en 432. il s'intéressait à cela dès le début, stratégie bien connue car les athéniens ont suivi la vie de Périclès. Beaucoup de chances pour penser qu'il a entendu le discours de Périclès. Mais pour le cas des corinthiens, il n'a pas pu assister au discours, se déroulant à Sparte.
La méthode de Thucydide
Il fait un grand pas dans l'historiographie, il décide de s'intéresser uniquement à l'histoire politique, alors que Hérodote s'intéressait à tout. Guerre, diplomatie, restriction des études pour l'étudier de manière approfondie. Un récit, une narration objective de Thucydide pour donner un point de vue cohérent des événements militaires et diplomatiques. C'est ce qu'on appelle ergon. Ergonomie = ce qui est organisé en sorte que le travail soit efficace. Première partie du récit de Thucydide, présentation ordonnée, objective des événements. Deuxième partie : les discours (logos). Très importants. Thucydide s'exprime clairement à ce propos, introduction méthodologique dans son ouvrage. Il dit qu'il a entendu lui-même, ou a enquêté auprès d'autrui pour relever les meilleures informations possibles. Pour lui, le devoir de l'historien est d'enquêter auprès d'autrui avec toute l'exactitude possible. En ce qui concerne les discours, il était bien difficile d'en reproduire la teneur même avec exactitude, autant pour lui que pour n'importe qui d'autre. Méthode de travail en ce qui concerne les discours ? Premier constat : ce n'est pas comme aujourd'hui. Thucydide établit une différence, dit que l'exactitude n'est pas de rigueur pour les discours. Lui-même qui réécrit les discours, néanmoins sans inventer. Rapporter les propos, l'idée qui se dégage de ceux-ci. Forme de déformation des choses, pour une plus simple compréhension. « J'ai exprimé ce qu'à mon avis ils auraient pu dire qui répondît le mieux à la situation, en me tenant, pour la pensée générale le plus près possible des paroles réellement prononcées. »
Discours fictif, comme un commentaire de la part de l'auteur, de Thucydide, tout en essayant de se rapprocher le plus possible de la véritable situation. Possible de savoir la teneur générale du discours, voire même de pouvoir retranscrire certaines paroles. Discours prononcé huit ans auparavant. Thucydide parle de deux méthodes qui ne sont pas exactement les mêmes. Toujours est-il que Thucydide ne se sent pas obligé de reproduire exactement le discours réellement prononcé, c'est à dire de chercher des sources, de s'informer. Pas d'obligation dans la citation exacte des textes. Méthode pas approuvée aujourd'hui. Pour être un peu radical, certains historiens vont parfois appliquer cette méthode même lorsqu'il s'agit de choses militaires. Pas tellement nécessaire de savoir comment une bataille s'est déroulée, mais comment elle a pu se dérouler selon son savoir militaire. Avoir expérience militaire, et décrire une bataille telle qu'elle a sûrement dû se dérouler, selon les connaissances des précédents conflits. Discours qui sont une sorte de commentaire des événements. Justification des actions des acteurs cités. Très souvent chez Thucydide, il construit deux discours opposés. Périclès répond partiellement au discours des corinthiens, mise en parallèle dans l’œuvre de Thucydide mais non pas dans la réalité. Sorte de mise en parallère de discours, de deux argumentations.
Par exemple, célèbre affaire de Mitylène, révolte en 427. Athéniens ont décidé d'agir brutalement, et ont proposé de raser la ville, de tuer les hommes, vente en esclave des femmes et des enfants. Les athéniens envoient une trière pour que ce soit exécuté. Deuxième débat apporté par Thucydide, avec deux discours, l'un pour, et l'un contre la condamnation. Gens qui ne sont pas éduqués obéissent à la loi, et leur cité est plus efficace, selon l'un de ces discours. Technique qu'il doit aux sophistes
L'influence des sophistes
L'ouvrage de Thucydide témoigne d'un changement radical, avec l'apparition d'un nouveau courant de pensée, celui des sophistes. Premiers à s'intéresser aux relations humaines, premiers à dire qu'elles sont intéressantes en soi. Domaine que l'on appelle la politique. C'est pourquoi Hérodote décrit l'histoire dans tous ses aspects, car il ne sait pas encore que la politique est un domaine à part entière. Sophistes estiment que ce domaine peut être maîtrisé, à l'aide de leurs techniques. Sagesse qui est une capacité, presque une technique, se manifestant dans le domaine de la rhétorique. Comment influencer, maîtriser... avant, on disait qu'il fallait être bien éduqué dans une bonne famille pour participer à la politique. Mais les sophistes estiment que chacun peut apprendre, ils sont enseignants professionnels de la politique, de la technique à apprendre qui peut être maîtrisée par tout le monde. Plus concrètement, technique consiste à formuler une série d'arguments, et de les opposer. Savoir envisager toute sorte d'arguments. Les sophistes disent qu'il n'y a aucune vérité, car on peut prouver à l'aide d'arguments bien choisis. « L'homme est la mesure de toute chose ».
Ils ne s'intéressent pas à la vérité, mais à la façon d'argumenter. Thucydide est capable de construire quelque chose de construit, argumenté, par rapport à la politique.
Hérodote fait parfois preuve de naïveté dans la description politique. Alors que chez Thucydide, l'explication est parfaitement logique, il construit un récit argumenté, concentré sur la politique. But est d'expliquer les actions humaines à l'intérieur de la politique. Maîtrise de l'art qu'est de construire un discours logique. Les sophistes utilisaient cette technique dans le but d'influencer dans la politique, alors que Thucydide l'applique dans le domaine de l'historiographie. Il a ainsi établi un lien durable entre l'historiographie et la rhétorique
Thucydide et la postériorité
Historiographie suit le chemin tracé par Thucydide, notamment en ce qui concerne la place et l'importance des discours dans les ouvrages historiographiques. Expliquer motifs, intentions, causes avouées ou non... Ils ne seront pas gênés de construire des discours fictifs. Exactitude n'est pas visée par les historiens antiques.

Conclusion
Pour les anciens, historiographie était très proche de la rhétorique, avec pour objet de réflexion la politique. La rhétorique sert à comprendre la réalité politique pour persuader dans un débat, l'historiographie a pour but de relater les faits de manière logique et réaliste les événements, pour persuader le lecteur.
Les historiens antiques n'ont pas besoin d'utiliser de guillemets, car les textes qu'ils relatent ne sont pas exacts. Une bonne partie de ces discours a un caractère purement fictif. Autre chose importante : les historiens antiques utilisent de manière générale un autre critère de véracité que l'historien moderne. Aujourd'hui, discours véridique est ce qui est conforme à ce qui s'est réellement passé. Un historien fiable est celui qui essaie de raconter les choses selon ce qui s'est réellement passé. Pour les historiens antiques, la véracité de l'historien repose sur la conformité avec leur expérience politique. Là où il manque des infos, on peut compléter par ce qui est probable selon notre expérience politique. Expérience politique avant de devenir historien. Ce qui paraît aujourd'hui condamnable. Pour eux, c'est normal, car il y a un lien entre politique, rhétorique, et historiographie.


Les vases

Objet ayant une fonction utilitaire. À quoi un vase peut-il servir ? Stockage tout d'abord, récipient. Manger, boire, vaisselle de table. La toilette, il peut servir pour se laver. Usages pratiques. À partir de l'analyse de ces fonctions, les archéologues reconstituent les aspects de la vie quotidienne. Quelle est la spécificité de l'objet ? Produit massif, qui se casse, donc production massive. Possibilité de le mettre en série.
Produit facile à faire également. Le plus grand avantage du vase est qu'il se conserve. À la différence du papyrus, du bois, du métal... vestige qu'on peut utiliser pour l'analyse des sociétés anciennes. Comment peut-on faire parler un vase ?
Tout d'abord, déterminer sa provenance, se faisant à partir de l'étude de l'argile, qui peut se faire de façon chimique, on peut dire d'où vient un vase. La forme peut indiquer l'usage qui se faisait de ce vase. Ensuite, on réfléchit à la qualité artistique de l'objet. Intervention de la distinction entre la céramique commune et la céramique fine.
Céramique fine est un objet d'art pouvant être produite localement. Mais certaines cités en ont fait une spécialité artisanale. À partir du sixième, Corinthe, petits vases à parfum, diffusés dans le bassin méditerranéen. Reconstitution du réseau commercial, possibilité de faire cartes d'importations/exportations. Possibilité de parler de la décoration, cela nous ramène aux images. Céramique figurée : avec figures qui témoignent d'une histoire. Dans cette céramique, on distingue des vases à figures noires, argile brûlé à l'aide d'une technique particulière. Fond rouge, couleur de l'argile. À partir du sixième que se développent les atelier de potiers à Athènes, notamment dans le quartier appelé « céramique », connu pour ses atelier de potiers. À partir des années 530, autres techniques.
Vase à figure rouge, fond en vernis noir, personnage gardé dans la couleur de l'argile. Plus de possibilités pour l'artiste, mieux pour faire des détails. À la fin du dix-huitième que les collections de vases commencent. On les cherche, on pille des tombes pour en trouver. Très grande majorité des vases trouvée en Italie du Sud, produits d'importation. Vases dans les tombes, qui peuvent représenter un banquet, trouvé dans un temple étrusque. Banquet des vivants, mais mis pour représenter banquet des morts, détournement de sens de la part des étrusques, pour la vie après la mort.
Les colonies de la mer noire importaient aussi des vases, pour vivre à la grecque.

Le vase comme une source iconographique

Images sur les vases sont une source importante. Il faut apprendre la langue de ces vases, on parle aussi d'iconologie, art d'interpréter le langage des images. Quels aspects de la vie des grecs ces images illustrent-elles ? La mythologie tout d'abord. Athéna qui lutte contre un géant. Mythologie qui nous est connue par la poésie, avec Homère. Tout poète libre de raconter ses propres histoires sur les dieux. Le répertoire iconographique enrichit notre connaissance des mythes. Plusieurs versions du mythe, voir quelle version se diffuse le mieux... Vases sources précieuses d'infos pour tous ceux qui s'intéressent à la religion. Images qui sont aussi une info au sujet du sport, ou plutôt des concours qui font partie des fêtes religieuses : forme de vénération des dieux. Théodose a interdit les jeux olympiques lorsqu'il a décidé que le christianisme soit religion officielle.
Pour le banquet, les grecs disaient symposion (boire ensemble). Après avoir mangé, on s'allonge, on boit ensemble, on fait l'amour, on discute des choses de la société, des poésies... Coupe qui sert à boire représentant le banquet, et un cratère, utilisé pour mélanger le vin avec l'eau. Jeu entre la fonction et l'image.
Un homme et une femme représentée, ce n'est pas une épouse, mais une prostituée. Distinction très nette entre les prostituées. Seules femmes qui sont dans la société masculine, femmes cultivées, ayant un statut plutôt élevé dans la société. Surement esclaves, propriétaires les envoyant à un banquet aristocratique. Distinction entre trois catégories de femmes :
Les hétaïres (femmes de haute société appartenant au monde masculin) pour le plaisir, concubines pour les soins de tous les jours, les épouses là pour une descendance, garder le foyer. Derrière les hétaïres et les hommes, il y a des armes pour souligner le statut des hommes, armes hoplitiques, ils sont citoyens. Banquet est une forme de vie collective, publique, discussion de la politique, poésie, culture... là que sont aussi nués certains complots.
Image construite selon l'hypothèse que l'observateur a en tête toutes les images, les symboles. Scène érotique claire. L'un des deux joue de la musique. Pas le même âge, un imberbe, un barbu. Aristocrate adulte entretenant un rapport érotique avec un adolescent. S'agit-il d'un esclave ? Non, c'est un homme libre, jouant le même rôle que les hétaïres. Introduction du jeune garçon dans le monde politique, culturel et érotique. Sorte d'initiation. Pas de supposition de sexe quand on aime quelqu'un dans le monde grec. Cela peut être adressé vers personnes du sexe opposé ou du même sexe. Relations asymétriques, l'homme adulte pouvait être passionné par son jeune partenaire, autant le jeune homme ne devait pas être particulièrement emballé par la relation, il devait éprouver une certaine réserve. Un jeune garçon ne doit pas s'intéresser à ces relations, il serait condamné comme s'il se prostituait.
Vases sources riches des usages sexuels, de la vie quotidienne, familiale... Le monde féminin est très présent dans les vases. À en juger par les images, elles jouent un rôle très important. Il faut s'appuyer sur les sources iconographiques, extrêmement importantes.
Davidson Greek Love.
À Paris, centre de recherche sur les images, dirigé par Françoise Lissarague. Organisation d'une grande expo, La cité des images, présenter autre cité que nous connaissons à travers sources écrites... beaucoup de scènes de banquets, féminines...

Merci mec!